<![CDATA[

Dans mes entretiens cliniques initiaux, j’ai depuis très longtemps mis en place un questionnement systématique.

Très souvent le patient arrive avec ses idées sur sa situation, et sur la méthode à utiliser d’après lui pour arriver au résultat qu’il vise, quand il vise un résultat précis. Souvent il arrive avec simplement l’idée qu’il veut aller mieux. Il ne veut plus être anxieux, ou ne plus avoir d’angoisses ou de phobies. Il veut éloigner le mal-être permanent qui l’habite.

Souvent, il arrive me voir parce qu’il a déjà un parcours chez le psychiatre qui lui conseille une psychothérapie, ou qu’il a perdu son psychologue habituel pour diverses raisons. Ou alors parce qu’il est en situation de rechute et qu’il a appris qu’avec les TCC, c’est mieux ! (Vu sur internet)

Souvent il est pris dans “Le piège du bonheur” (voir le livre de Russ Harris sur le sujet, Il y a même une version illustrée pour ceux qui n’aiment pas trop la lecture des livres techniques). Vous pouvez y retrouver aussi la problématique de ces patients dans un très bon livre de Benjamin Schoendorff , “Faire face à la souffrance“(ici pas de version illustrée, dommage 😉

Après avoir écouté, ce qu’il voulait dire en arrivant. Je lui pose la question suivante : “Vous permettez que je vous pose quelques questions, pour mieux vous connaitre et vous proposer la méthode la plus adaptée pour vous ?”

Il me répond immanquablement :  “bien sûr !” Et c’est parti pour un questionnement sur les 10 domaines de vie autour desquels ils évoluent.

Comme décrit ci-dessous dans la boussole des valeurs.Boussole des valeurs de vie

Et je déroule mes questions :

  • Comment vivez-vous “dans ce domaine” ?
  • Quelle perception en avez-vous ?
  • Êtes-vous satisfait de ce que vous y vivez ?
  • Comment aimeriez-vous que cela se passe ?
  • Qu’est-ce qui est vraiment important pour vous dans ce domaine ?

Et rapidement j’ai une photographie des habitudes de la personne, de ses aspirations, des dysfonctionnements qu’il perçoit. De la manière de présenter ses problèmes…

Enfin cela me permet de pouvoir ensuite aborder très rapidement, ACT en quelques métaphores. Puis de vérifier avec lui, que nous sommes d’accord sur la méthode et les objectifs de la thérapie. Souvent, nous sommes d’accord, et il arrive que la personne ne veuille pas s’engager dans cette thérapie, qu’elle veuille immédiatement “une séance d’hypnose” ou une séance de régulation émotionnelle (TIPI) ou d’EMDR. Alors, nous partons sur cette séance, mais au moins, elle connait ACT et sait ce que ACT peut lui apporter…  Et très souvent à la deuxième séance, elle me demande et si on utilisait la méthode que vous m’avez présentée la dernière fois, vous pensez que ce serait mieux pour moi ?

Le questionnement systématique me permet de converger très vite vers les problèmes du patient, et de permettre à celui-ci de se tourner vers des actions engagées vers ses valeurs pour avoir une vie pleine de sens. Je perds donc rapidement mes patients, et j’en suis très heureux pour eux, et donc pour moi puisque mon objectif est de mettre mes patients dans l’autonomie.

Malgré tout, il m’est arrivé de suivre pendant plus longtemps que prévu certains patients, pour m’apercevoir qu’un problème sortait au court de la thérapie que mon questionnement systématique ne prenait pas en compte. Et que le patient me dise au cours d’une séance, “J’ai été violé par mon cousin… ou par mon père” ou “j’ai été victime violences conjugales” ou “J’ai été victime de harcèlement moral”… Alors que le problème était “ailleurs” et le patient n’avait jamais eu l’idée de m’en parler…

Mais alors, pourquoi ? Parce qu’il n’avait pas confiance ? NON ! D’ailleurs lorsque je leur ai demandé, “pourquoi ne pas en avoir parlé avant ?” La réponse a toujours été… Je ne pensais pas que cela ait réellement de l’importance, ou je l’avais “oublié”. Bien entendu à partir du moment où le loup est sorti du bois, il a été rapidement maitrisé… Et j’ai encore perdu mon patient, avec joie… Car sa vie s’est rapidement améliorée… Vive ACT et la pleine conscience ! LOL

Alors je me suis, dit et si je regardais vers mon questionnement systématique et que je posais la question suivante : “Avez-vous subi dans votre passé des violences physiques ou mentales ?” … Certains de mes collègues disent : “Est-ce que vous avez déjà vécu des violences dans votre vie ?“…

Puis je creuse un peu :” Êtes-vous ou avez-vous été suivis pour cela ?”, “Est-ce toujours d’actualité ?”, ou “C’est fini depuis quand ?”, “Ça a duré combien temps ?”

Depuis je le fais systématiquement et … J’ai eu la surprise de voir apparaitre, souvent ces cas de violences, tant dans le couple, que dans la jeunesse. Que de temps gagné ! Que de souffrances évitées ! Comment une simple question à la première séance peut changer de manière très importante la suite de la thérapie, en permettant très rapidement au patient de commencer à s’ouvrir vers la vie, plutôt que de rester tourner vers l’évitement et la lutte.

J’en ai parlé à d’autres professionnels, des assistantes sociales, et des médecins, qui me disent que pour leur cas à eux, c’est exactement la même chose. Et si vous posiez ces questions sur la violence dans vos entretiens initiaux ?

Des difficultés à le faire ? Pour ma part, je n’ai jamais rencontré de difficulté pour poser ces questions. Je sais que certains de mes collègues ont reçu une réponse de type “Pourquoi voulez-vous savoir cela ?” et ils répondent : “Je pose la question à tout le monde parce que les violences peuvent avoir des conséquences sur la santé psychique, voire physique, et que c’est important de les dépister”.

J’ai ajouté cette question dans tous mes questionnements systématiques depuis 1 an maintenant. Et si tous les professionnels des métiers de l’accompagnement s’y mettaient ? La détection des violences conjugales serait déjà tellement facilitée ! Au-delà du fameux “point noir” ! On s’engage ? Questionnement systématique de détection des violences conjugales, moi, je m’engage !

Le point noir.jpg]]>