Dernièrement, je participais à un repas d’association où nous échangions sur l’actualité de chacun. Et je parlais des deux jours magnifiques de la semaine dernière où j’ai médité pendant plus de 14 heures dans le silence. Une méditation très intense, où la position à genoux sur mon zabuton tout confort et mon tabouret à la bonne hauteur m’a semblé quelquefois, tellement dur… Ne rien faire, seulement observer l’instant présent c’est très fatigant quand on n’est pas habitué de le faire si longtemps d’un coup.
À côté de moi, un jeune médecin racontait son actualité du jour.
– Vous vous rendez copte ? Ma mère est partie de la maison pour faire ses courses au supermarché d’à côté sans son téléphone. Et elle n’est rentrée chez elle, qu’au bout de trois heures, sans prévenir. Et, impossible de la joindre sur son portable, car elle l’avait laissé chez elle. Or elle a à la maison, mon grand père de 90 ans, qui va très bien, mais il était très inquiet et il a appelé, toute la famille, dont moi. Lorsque ma mère est rentrée, je lui ai demandé, “Tu t’es aperçue que tu avais oublié ton téléphone ? Quand ? Elle m’a répondu, “oui quand je suis arrivé au supermarché.”
Alors, là je lui ai passé une soufflante ! Tu aurais dû revenir! Tu ne te rends pas compte ? Tu aurais pu avoir un problème ? Elle n’a pas compris… C’est incroyable, hein ? dit-il en me prenant à témoin… Je lui demandais alors … mais ta mère, elle a quel âge ? 62 ans ! Ce n’est plus tout jeune…
Je n’ai pas pu m’empêcher de rire … “Ben elle n’a que 2 ans de plus que moi… J’ai 60 ans…” – oui, mais elle a eu un cancer ! “Ben, moi aussi, et alors ? Je suis obligé de prévenir mes enfants, si je veux aller me promener avant de faire mes courses ? Je n’ai pas de compte à rendre à mes enfants que je sache…” – oui, mais toi, tu n’as pas à garder ton père… “Ben moi, j’ai ma belle-mère qui vit seule, à 86 ans, à côté de chez moi, et qui fait des crises d’allergies… Et alors ?” Je dois être en prison pour ça ?”
– Oui, mais toi ce n’est pas pareil si elle a un problème … Là je l’ai interrompu… “Si elle a un problème, elle appelle d’abord le 15 ! Puis moi… Ton grand-père peut faire pareil non ? Il existe des téléphones qui font cela sur simple pression d’un bouton… Il a été capable d’appeler toute la famille, donc il peut appeler le 15 en cas d’urgence… Tu m’as dit qu’il va bien… C’est incohérent, ton inquiétude…”
Finalement, il a fait la tête et et resté convaincu que j’avais tord et que je ne comprends rien… Sa mère, À LUI, n’a pas le droit de partir de chez elle, sans téléphone !
Et là, je suis resté, très pensif, sur notre prison de l’immédiateté. Quand j’étais plus jeune, il n’y a pas si longtemps, je n’avais pas de portable. Il y avait des cabines publiques. Il fallait avoir des pièces…Et quand ma première épouse est morte, j’ai été mis au courant par téléphone le matin… Bien après la découverte du décès… Ma belle-mère de l’époque a fait au plus vite… Je ne lui en ai pas voulu. Mais , si je l’avais su avant, cela aurait changé quoi ?
Et vous ? Faites une rapide introspection, quel est votre rapport avec le téléphone ? C’est un outil pratique ? Ou finalement une prison ? À une époque, on s’envoyait des lettres… Aujourd’hui… Tu te fais engueuler, quand tu oublies ton portable !
J’ai déjà écrit un article sur le tempstalitarisme… (Totalitarisme du temps) … C’est de plus en plus d’actualités… Et si on remettait les choses à leurs places… Parce que je suis une personne-ressource pour mes proches, je suis en prison ? Être un aidant, c’est finalement une prison ? Vous vous rendez compte de la pression que l’on met sur les aidants ?
Et au-delà de ça. Les enfants, avec le fil à la patte du téléphone, prisonniers de leurs copains et copines… “Si tu ne réponds pas immédiatement c’est que tu ne m’aimes pas !”
Chacun choisit sa prison, mais, est-ce en pleine conscience ? Va savoir Charles ?
Aie ça fait mal! Il faut le dire. Pour moi, avant l’initiation à l’ACT, chose pour laquelle je te dois beaucoup de gratitude, c’était une souffrance comme pas possible.
1- Je ne suis (être et suivre) pas mon téléphone et mon téléphone ne me suit plus.
2- Je n’habite pas dans mon téléphone et mon téléphone ne représente pas mon foyer.
3- Je ne vis pas dans mon téléphone et mon téléphone ne représente pas ma vie.
A cause de cela, j’ai perdu le contact avec des personnes qui n’étaient prêtes à m’accorder le droit à mon intimité , des personnes qui m’étaient chères. D’où ma souffrance à l’époque. Il a fallut que j’accepte le fait d’être dans mon droit de ne pas considérer l’amour comme une quelconque sorte de troc. J’aime mon intimité et j’aime mes semblables. Ça marche ensemble mais il est hors de question de prétendre à un échange entre l’un et l’autre.
Merci pour ce partage Khadija,
Comme je te comprends, et comme il est difficile de faire respecter son droit à l’intimité, dans certains cas.
Bonjour Pierre, Merci 😉